Cinoche : Tetro

Photo de famille en noir et blanc.

Quel début d'année 2010 au cinoche !
Après le cirque à grand spectacle (mais quel cirque et quel spectacle !) d'Avatar, voici le Tetro de Coppola, un film on ne peut plus "classique".
Classique dans le bon sens du terme : c'est filmé en un si beau noir et blanc qu'on en vient à regretter que le technicolor ait été inventé !
Chaque plan est travaillé au millimètre, les jeux d'ombres et de miroirs se font écho, la musique fait presque partie des dialogues : du grand cinoche comme on aime.
Et puis quelle histoire !
Lorsque vient le générique de fin, on sent l'estomac qui se relâche, qui se décrispe, ouf ! on en est sorti vivant, pas tout à fait indemne mais vivant !
Aucune violence physique à l'écran, mais quelle tension dans cette sombre histoire de famille où Coppola revisite le mythe de Coppélia (1).
Bennie et son frère Tetro souffrent d'une fracture familiale irrémédiable : leur père, despote omnipotent et tyrannique, les aura brisés (2), désarticulés, tout comme la poupée Coppélia.
Chacun sait que les papillons sont irrésistiblement attirés par les phares et les lampes et finissent par s'y brûler les ailes : ainsi les deux frères Tetrocini sont irrésistiblement attirés par les lumières de la vérité ou par les flashs de la célébrité.
Tetro (le sombre, le triste) le frère aîné, ange déchu aux ailes brisées, semble avoir compris cette règle élémentaire de survie et a visiblement rompu aussi bien avec son passé d'écrivain qu'avec sa famille, reniant même jusqu'à une partie de son propre nom.
Bennie, le cadet, est arrivé à retrouver son frère et tentera de retrouver également son passé, leur passé, en décodant les écrits de son aîné. Il y découvrira de lourds secrets. De très lourds secrets.
Des secrets qui pesaient sur Tetro (Vincent Gallo halluciné) au point de le rendre fou et d'en faire un écrivain maudit dont le seul refuge semble être la peau de sa compagne (admirable Maribel Verdú). Avec Alden Ehrenreich qui incarne le jeune Bennie, Coppola tient là un trio d'acteurs époustouflant et dès la première scène on oublie immédiatement qu'on est au cinéma et qu'ils "jouent" un rôle (3).
Coppola développe également le thème de l'usurpation artistique (4) et il peut y avoir de nombreuses lectures de ce film, très riche, très dense. Que chacun en fasse la sienne mais que personne ne passe à côté !

(1) : Giuseppe COPPOLA (oui, oui !) était le nom du marchand ambulant du conte d'Hoffmann qui inspirera plus tard le ballet Coppélia ...
(2) : au figuré comme au propre : tous deux se retrouveront avec une jambe plâtrée.
(3) : ce qui est d'ailleurs accentué par les mises en abyme qui viennent ponctuer le récit avec séquences de film, pièces de théâtre et ballets, joués dans le film.
(4) : encore une tare héréditaire dans la famille Tetrocini, depuis le père et l'oncle jusqu'aux deux frères ...


Pour celles et ceux qui aiment les histoires de famille.
Céline, Benjamin, Kilucru, Pascale, tout le monde est d'accord.
Le Monde en parle, ES également.

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