Cinoche : Marguerite


L'histoire de la comtesse aux pieds nus qui chantait faux.


Marguerite, le film de Xavier Giannoli dans lequel Catherine Frot incarne Florence Foster Jenkins, cache vraiment bien son jeu.
Ce qui explique sans doute les incompréhensions et les déceptions ici ou là.
Contrairement à ce que l'on pourrait penser, le film n'a pas grand chose du 'biopic' de cette dame à qui personne n'osait dire qu'elle chantait incroyablement faux (c'est Stephen Frears qui prépare le 'vrai' biopic pour l'an prochain, avec Meryl Streep).
Le film de Giannoli n'a surtout rien non plus d'une comédie amusante : certains rigolent (un peu jaune) pendant les deux premières séances de chant mais tout cela tourne très vite à la farce très amère.
Avec en prime quelques accents surréalistes qui lorgnent plus du côté de Bunuel que de Chabrol.
Le film est particulièrement féroce, non pas parce que acteurs et spectateurs se moqueraient de cette riche chanteuse à la pauvre voix, non, mais parce que notre société dépeinte par Giannoli est d'une rare et sourde (sans mauvais jeu de mots) violence.
L'histoire de cette 'cantatrice' américaine dont l'argent achetait critiques complaisants et public bienveillant a été transposée ici en 1920 en France. Une France bourgeoise et arriviste, qui se remet à peine de la Grande Hécatombe et qui prépare la suivante en prospérant sur les ruines de la précédente.
Marguerite fait inévitablement penser à la farce de Molière (on a même droit aux leçons données par le Grand Mamamouchi), mais si les bourgeois sont bel et bien là, on ne verra point de gentilshommes mais plutôt toute une faune (des chasseurs, des militaires, des dandys anarchistes, ...) qui essaie de profiter de l'argent de la comtesse (il sera beaucoup question d'argent ...) et qui se vautre dans le luxe, le gibier, l'arrogance et les plaisirs des années folles.
Au milieu de cette fange, Catherine Frot passe tel un ange (elle ne mange que des choses blanches et pures, comme elle). Évidemment, l'ange finira par se brûler les ailes après avoir été manipulé par des dandys, à demi artistes, à demi anarchistes, mais tout aussi corrompus que les bourgeois arrivistes qu'ils pensaient dénoncer.
On regrette juste un film malheureusement un peu long et un peu lent mais c'est finalement comme une évidence : seule Catherine Frot pouvait endosser ce rôle. Chapeau l'artiste.

Pour celles et ceux qui aiment les maîtres chanteurs.
D’autres avis sur Sens Critique.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.