Cinoche : Jindabyne

Après Lantana, un autre faux polar australien.
Après l'Espagne des Tournesols, le Liban de Caramel, le mois d'août ciné nous propose encore un autre voyage, en Australie cette fois, à Jindabyne.
Mais si la pancarte à l'entrée de ce trou perdu au bout du bout du monde annonce fièrement « Welcome to Jindabyne », il ne faut pas s'y fier !
Dès les premières images, tout est fait pour distiller l'inquiétude, le doute, et nous mettre mal à l'aise : le crime qui se prépare, les deux enfants aux jeux inquiétants, les tensions et les non-dits au sein de leurs familles, ...
Même les paysages grandioses d'Australie sont filmés pour ne pas nous donner envie de nous y arrêter.
Derrière la façade, tout se fissure et semble prêt à éclater, et faire semblant comme si de rien n'était ne semble plus suffire.
Le réalisateur (Ray Lawrence) s'amuse à nous promener de cliché en cliché : le tueur embusqué dans son camion comme celui de Duel, l'équipée vers la rivière qui menace de tourner comme celle de Boorman, les baignades dans le lac aux allures de Dents de la mer, ...
Et bien sûr vous lirez partout la trame «policière» de l'histoire : une bande d'amis partis en week-end de pêche au bord d'une rivière reculée découvre le cadavre d'une jeune femme aborigène noyée dans l'eau. Au lieu d'appeler tout de suite les autorités, ils l'attachent à un arbre pour éviter qu'elle ne dérive et continuent leur partie de pêche un peu plus haut, en faisant là aussi, semblant, comme si de rien n'était.
Mais le thriller n'est là que pour le décor : à leur retour en ville (enfin, dans ce trou perdu au bout du bout du monde qu'est ce fameux Jindabyne à 17.000 km d'ici), nos amis pêcheurs découvriront qu'ils ont fait «le mauvais choix» et devront assumer les conséquences de leur acte, alors qu'autour d'eux et entre eux les masques tombent, les couples et les amitiés se défont, l'incompréhension est totale entre les deux communautés (les colons blancs catholiques et les aborigènes qui ont perdu une des leurs), la haine et le racisme ressortent au grand jour.
Comme s'il avait été besoin de ce «fait divers» pour que chacun ose dire le non-dit et pour que les drames du passé que l'on avait enfouis (comme l'ancien village qui dort au fond du lac de barrage) puissent ressurgir à la lumière.
De quoi nous donner envie de revoir, en DVD ou en VOD, l'excellent Lantana, un faux-polar que Ray Lawrence nous avait déjà donné en 2001 et dont on se rappelle encore la sombre ambiance, 5 ans après.


Vous remarquerez peut-être dans le générique du début un avertissement au public aborigène australien : «dans ce film, les noms de personnes décédées sont prononcés» et cet avertissement est d'ailleurs répété lors d'un flash d'information à la télé, dans le film lui-même : en effet, selon les croyances aborigènes, le nom d'un mort devient tabou et ne doit plus être évoqué après le décès.
À noter aussi, les petits pointillés de l'art aborigène s'exposent au musée Branly (expo temporaire en complément de la collection permanente du musée).


Libé et Rob en parlent, ainsi que Les Échos et d'autres sur Critico-blog.

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